Le Figaro / Armelle Héliot
L’offensive Shakespeare
Le metteur en scène David Gauchard, patron de la compagnie L’unijambiste, installée en Limousin, utilise les formes les plus modernes de la représentation pour nourrir un spectacle sombre dans lequel la musique, les arts graphiques, la vidéo sont une place de choix. C’est tout à fait bien maîtrisé en une version réduire à deux heures et qui fascine les jeunes. (…) C’est frénétique et vénéneux.
L’Humanité / Marie-José Sirach
David Gauchard met en scène Richard III de Shakespeare : projet séduisant truffé de trouvailles
Gauchard a imaginé 2 doubles, l’un incarné par Arm (…) qui mêle subtilement Shakespeare à quelques-uns des lyrics de sa compositions. A l’opposé du plateau, Olivier Mellano, compositeur, guitariste assez époustouflant dont la partition musicale épouse les méandres du cerveau torturé de Richard III, qui impose une présence incontestable. Au centre, agité comme ces héros déjantés qui pullulent chez Tarantino, Richard III, duc de Gloucester, porté avec l’énergie du fol désespoir par un Vincent Mourlon étonnant, totalement à son personnage, hoquetant, balbutiant, imprimant à son corps les soubresauts de la folie qui irriguent son sang, donnant un relief abîmé à cette figure solitaire qui plonge à corps perdu vers les abîmes de l’histoire.
Télérama Sortir – Le Choix de la semaine / Thierry Voisin
David Gauchard a réunit 3 rois Richard III ! Un comédien, un rappeur et un guitariste : Shakespeare lui dit merci !
Le premier est fou sans nul doute ; le second gracieux et diabolique ; et le troisième, ténébreux. Cela commence comme un concert, (…) mais très vite le drame se déchaîne. (…) Et cela devient un feuilleton sanguinaire, une performance technique, où les effets spéciaux ne gâchent pas la force vénéneuse d’un texte flamboyant.
France Inter / Alternatives
Laurence Pierre : Sur l’intrusion du numérique dans les arts vivants, j’aimerais avoir votre sentiment là-dessus, parce que ça fait 14 ans que « Exit » existe, et le numérique est partout de fait, ça a changé totalement l’appréhension de l’art, finalement.
Didier Fusillier : Ce qui est magique au théâtre, c’est que les acteurs sont vivants devant vous, vous le voyez bien. Et puis ils sont accompagnés d’un clone, et qui disparaît. Alors là, le choc est terrible. On confond toujours vidéo et numérique, mais le numérique c’est vraiment une écriture dramaturgique, c’est-à-dire que ça apporte du sens. On n’est pas simplement devant un effet de lumière, on est devant quelque chose qui raccroche encore plus à une pensée, à un éclaircissement. Là, par exemple, on a montré à Maubeuge au dernier Festival VIA un jeune gars, il est dans le coin de Limoges, il a monté un Richard III, il s’appelle David Gauchard, là, croyez-moi, on est ailleurs, on est terrifiés, parce qu’on a affaire à des assassins et c’est très fort parce que c’est vraiment encore du théâtre, mais bourré de numérique.
Laurence Pierre : Et vous l’avez trouvé où, celui-là ?
Didier Fusillier : On nous a dit « il faut le voir », on l’a trouvé. Son acteur qui joue Richard III est comme Dewaere, Patrick Dewaere, c’est-à-dire quelqu’un… on sent quelqu’un qui est incontrôlable. Et ça, je crois que c’est propre au théâtre.
Le Dauphiné Libéré / Gaël Herbert
Shakepeare et riffs éclectiques
C’est à une performance technique esthétique qu’ont assisté les spectateurs du Train Théâtre ce mardi soir. (…) Une performance d’acteurs également, deux heures d’un texte difficile durant lesquelles les caractères se dévoilent. Pour Gloucester, ils passent graduellement d’une obséquiosité fielleuse et retord à un délire paranoïaque, de la flagornerie la plus vile à la lâcheté la plus pitoyable pour les courtisans. Performance technique encore, du guitariste qui scande en rythmes oppressants l’horreur fratricide. Performance du traitement de l’image vidéo, enfin, épurée, jusqu’à ne transcrire que l’émotion, l’arrogance, la peur qui anime le personnage.
Ouest France / Benoit Le Breton
Richard III, captivant feuilleton high-tech, sa noirceur, son rap et sa guitare.
Il fallait oser. (…) Le Richard III de David Gauchard, (…) est ultra-moderne. Branché ? Peut-être, mais sur la même longueur d’ondes que Shakespeare, dont l’oeuvre, loin d’être desservie, est mise en valeur par la technologie. La vidéo donne du relief à l’implacable accession au pouvoir du monstrueux Richard. La pièce devient un captivant feuilleton que l’on suit sans s’attarder sur les effets spéciaux, qui n’écrasent jamais le texte. La puissance du verbe de Shakespeare est intacte et magnifiquement servie par un Vincent Mourlon, campant un élégant Richard, à l’assurance glaçante.
L’Echo de la Haute-Vienne / Jacques Morlaud
Terriblement efficace
David Gauchard nous offre une oeuvre adaptée à notre temps, qui suggère plus qu’elle ne montre, qui conduit à une réflexion sur un thème immortel, le pouvoir. (…) Il présente un spectacle passionnant, signant une mise en scène intelligente, soigneusement travaillée et usant de détails à bon escient. Sur fond de guitare (Olivier Mellano), les personnages évoluent avec aisance et élégance, à commencer par Richard III incarné excellemment par Vincent Mourlon.
Le Petit Bulletin (Lyon et Grenoble) / Aurélien Martinez
Richard III outrenoir
Au milieu des 207 mises en scène d’un texte de Shakespeare visibles chaque année, celle de David Gauchard détonne littéralement, avec son Richard III urbain, musical et hypotonique. Après la claque Hamlet / thème & variations, on attendait non sans impatience la relecture par la cie L’unijambiste d’un autre monument shakespearien qu’est Richard III. quelle ne fut pas notre surprise : alors qu’on subodorait logiquement que David Gauchard allait réutiliser les recettes qui lui avaient si bien réussi la fois précédente (à savoir mixer habilement la verve et la narration shakespeariennes aux sons très contemporains de l’électro et du hip hop), on se retrouve face à une version on ne peut plus fidèle à l’oeuvre originelle, là où dans Hamlet il se permettait de tout passer au shaker. Bien sûr, le metteur en scène conserve son univers artistique, mais il le met pleinement au service du texte retravaillé pour le plateau par le traducteur André Markowicz. Son Richard III devient alors un spectacle froid et tendu, qui hypnotise ceux qui acceptent de se laisser guider dans ce monde de folie.
La Montagne / Robert Guinot
Une adaptation de Richard III dérangeante, magnifique.
Gauchard a traduit le chef d’oeuvre de Shakespeare en utilisant les moyens techniques d’aujourd’hui. Il s’est montré imaginatif, audacieux et totalement convaincant. Le texte est là, dans toute sa pureté et sa clarté.
Chaque discipline est maîtrisée à la perfection. L’utilisation de la vidéo tient de la prouesse. Elle éclaire la pièce par ses phrases, par les silhouettes de comédiens qui s’animent sur l’écran et qui s’intègrent totalement au propos. La mise en scène est intense, elle ne laisse pas une seconde de répit. Elle valorise les comédiens dont le jeu s’avère subtil et vivant.
L’Echo du Centre / André Clavé
Richard III, un spectacle qui « despote »
L’adaptation de David Gauchard a du mordant, à l’image du chien de leur affiche, aussi puissant que beau, qui fuit une ville en flammes.
Que ce soit Vincent Mourlon, impressionnant de justesse, Arm à la voix du diable ou Olivier Mellano à la guitare « rumeurs » tout avançait implacablement autour des mots de Shakespeare, forts, jamais datés, toujours aussi prégnants et obsédants. (…) David Gauchard et ses « Unijambistes » ont créé ce que l’on se doit d’appeler un chef d’oeuvre.
Les trois coups / Léna Martinelli
Shakespeare rap and roll
David Gauchard a choisi de mêler les disciplines pour mettre en scène « Richard III », qu’il présente comme un monstre à trois têtes. Portée par un comédien, un rappeur et un guitariste, la pièce prend un sacré coup de jeune. Une performance théâtrale et technique originale, un Shakespeare magistral.
Sacré défi de camper Richard III, l’un des tyrans les plus sanguinaires immortalisés par Shakespeare ! Vincent Mourlon le relève avec brio, incarnant un duc de Gloucester impressionnant, figure solitaire d’un royaume au bord du chaos, allégorie du mal. Sa présence est forte et son jeu précis. Au centre, il partage la scène avec Arm, rappeur qui scande son texte sur un rythme binaire, comme le cœur qui manque à Richard III, ainsi qu’avec Olivier Mellano, guitariste et compositeur d’une partition musicale épousant parfaitement les méandres de sa pensée torturée. Car, ici, on assiste effectivement à l’ascension, mais surtout à la chute brutale de ce roi battu par le futur Henri VII d’Angleterre. Tragédie oblige !
Un monstre à trois têtes
Pas moins de trois hommes pour incarner Richard III, sombre héros rap and roll ! Difforme et cruel, celui-ci incarne le désordre. Frénétique, il complote, il s’agite, distillant son poison mortel et détruisant tout sur son passage. Les autres personnages font quelques apparitions sur scène, mais ils apparaissent surtout dans des séquences filmées. Leur image, travaillée graphiquement, fait penser à des avatars, avec lesquels ce roi maudit négocie avant de les trahir. Bien que le plus inhumain de tous, ce « chien galeux » de Richard III, est, quant à lui, bien là, en chair et en os. C’est d’ailleurs le seul dont on voit le sang couler.
Tandis que ses victimes sont toutes anéanties par manettes de jeux vidéo, Richard III, n’échappe pas à son funeste sort. S’il ne vit que pour assassiner, il finit par plonger, à son tour, dans les abîmes de l’histoire. À corps perdu. Tué dans la mêlée dans laquelle il se jette pour essayer de se battre personnellement avec Henri Tudor, sa mort met fin à la guerre des Deux-Roses. Et la tragédie s’achève sur l’image de mains couvertes de sang. Pas sur son cadavre.
Bien que radicaux, ces partis pris de mise en scène sont très intéressants car ils apportent un nouvel éclairage dramaturgique. Le refus de tout réalisme (y compris dans les décors réduits au strict minimum et dans le jeu des acteurs, sobre, direct et frontal), la mise en avant du personnage principal dont la parole est isolée, tout ces choix traduisent bien les troubles psychiatriques de Richard III : déréalisation (altération de la perception du monde extérieur qui apparaît comme irréel) et paranoïa. Donc, pas de pathos ici, pas de magie, non plus, si ce n’est celle des effets spéciaux, à laquelle la mise en scène réserve une place de choix.
C’est sans doute pourquoi ce spectacle interpelle les adolescents. D’abord, la version, resserrée à deux heures, va à l’essentiel : la fulgurante accession au pouvoir, les deux années de règne marquées par les complots, la folie qui précipite Richard III au bord du gouffre. Ensuite, la forme modernisée démontre bien le caractère universel de cette réflexion sur le pouvoir. À condition d’être sur la même longueur d’ondes, la pièce nous parle autrement. Richard III n’a jamais été aussi vivant, aussi actuel. Si le spectacle commence comme un concert, il se transforme vite comme un drame déjanté où le jeu de l’acteur se marie parfaitement au numérique. Et cela résonne fort ! C’est dérangeant à souhait.
Branchée, cette adaptation n’en dessert pas pour autant le grand Will, dont toute la puissance du verbe est préservée. Shakespeare passé au shaker, donc, mais respecté, avec une traduction intéressante d’André Markowicz. Il en est de même de la poésie que recèle ce chef-d’œuvre du xviie siècle, puisque David Gauchard n’illustre jamais, préférant plutôt exciter notre imaginaire. Adeptes des nouvelles technologies qu’ils détournent (mais toujours dans une quête de sens), ces artistes-là démontrent que c’est nous, êtres humains, qui fixons toujours les limites du possible.